samedi 27 octobre 2007

tonton Claude

Quand j’étais petit, mon oncle Claude était ce qu’il est convenu d’appeler ma figure paternelle : c’était l’homme le plus masculin, imposant et plein d’autorité de mon entourage. Mon père n’était pas très présent, mes grands-pères diminués physiquement, jeunes déjà.
Oui : tonton Claude était une grande figure virile, celui qui réparait l’électricité à mains nues, immunisé contre le courant depuis qu’il avait été électrocuté pendant la guerre d’Algérie, celui qu’on craignait de réveiller quand il dormait tard les lendemains de bals (car tonton Claude était musicien, ce qui me faisait encore plus rêver ! et je ne parle même pas de ma fierté quand il me laissait l’accompagner au piano…), celui qu’on brûlait d’aider quand il construisait encore une nouvelle pièce dans le chalet, lieu mythique de nos vacances. Celui devant qui aucune protestation n’était possible. L’homme le plus viril de mon enfance.
Déjà, cet été lorsque je l’ai revu, pour la première fois depuis plusieurs années, il m’a fait visiter deux fois de fond en comble le chalet : ne se rappelait-il plus que j’y avais passé tous mes étés de môme ? ne se rappelait-il surtout plus que je l’avais déjà visité avec lui la veille ?
Tonton Claude a la maladie d’Alzheimer. Je l’ai appris officiellement cette semaine. Tonton Claude va encore oublier que je connais déjà le chalet, tonton Claude va oublier que je suis devenu musicien - puis tonton Claude va oublier que je suis son neveu et, pour moi qui viens de le retrouver après toutes ces années, c’est vraiment dur d’imaginer le géant de mon enfance s’effriter petit à petit.
Et pleurer n’y changera rien.

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