Je ne suis pas du genre à lire
le dernier Modiano ou
le dernier Nancy Huston. De toute façon je ne lis qu'en poche : ça prend moins de place à ranger et surtout c'est moins cher - ce qui, quand on est un gros lecteur, doublé d'un
rapia, n'est pas un moindre argument.
Mais là, j'ai lu
le dernier Nourissier. En espérant que ce ne soit pas le dernier
dernier... François
Nourissier a plus de 80 ans et une santé moyenne, alors...
En fait, j'ai lu une bouleversante interview de l'écrivain dans un magazine,
L'Express je crois, "mis à ma disposition" dans une chambre d'hôtel, le mois dernier.
Nourissier y racontait sa difficulté à travailler avec la maladie, sa volonté de continuer pour "tirer encore dix ou vingt bonnes pages de ces mains" - et le déclin de sa femme dans l'alcoolisme, la noirceur de cette déchéance qui est le sujet du texte publié.
Pas vraiment un roman, donc. Pas non plus une autobiographie, puisque l'épouse est travestie en Reine et
l'époux, et écrivain, en
Burgonde. C'est une suite de récits courts, comme autant de chapitres dont les lignes pourraient se lire à part du reste du livre. Ils décrivent
l'alcool, ses errances, les rémissions et les suspicions de l'autre, celui qui regarde - et surtout la responsabilité d'icelui, comment
l'alcool festif peut devenir un ennemi absolu lorsqu'il devient
addictif. Ce livre questionne beaucoup et, comme on dit,
sans concession, le couple, le long cours du couple - et le vieillissement, les retranchements successifs que
d'autres décrivent : "je suis dans une soustraction" dit
Nourissier. De tout ça naît un livre bouleversant, dur et fort.
François
Nourissier,
Eau-de-Feu,
NRF Gallimard ; 181 pages, 15,90 €