mardi 17 juin 2008

"c'était il y a longtemps"

On dit qu'une personne âgée qui meurt c'est une bibliothèque qui brûle - avant que celle de ma grand-mère ne brûle, j'en tire tous les livres que je peux.
J'ai vu ma grand-mère samedi dernier, pendant environ une heure. Tout seul - j'aime bien la voir seule : je lui laisse le temps de penser, de parler tranquillement, je ne finis pas ses phrases à sa place comme le fait ma mère... Du coup elle me parle de choses très anciennes : samedi, c'était du temps de son mariage, de sa belle-mère - que j'ai connue petit -, de comment elle a élevé ses frères après la mort de ses parents... Recevoir ces confidences me réjouit. Je me sens comme le dépositaire d'une toute petite histoire, mais d'une petite histoire qui est une part de la mienne. J'ai de la chance de pouvoir en profiter.
Mais nous courons contre la montre : à chaque fois que je quitte ma grand-mère j'ai l'impression que c'est pour la dernière fois. Quand je suis parti samedi, elle a laissé très longtemps sa main gauche sur mon avant-bras droit, peut-être pour m'empêcher de la laisser seule trop vite ? peut-être pour sentir avec moi un contact profond, silencieux, entre nous ? quatre jours après, je sens encore la brûlure de sa main sur ma peau. Je sais que j'aurai encore cette empreinte après sa mort, et qu'elle me liera à elle profondément, par-delà les souvenirs partagés.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je comprends bien ça, cette idée que tout un pan de passé, d'histoire, peut partir avec la mort d'un être cher. Le besoin de recueillir les souvenirs avant qu'ils ne se perdent définitivement. Et le besoin de les raconter pour elle aussi...
C'est bien de l'écouter comme ça. C'est beau la relation que tu as avec ta grand mère...

Anonyme a dit…

moi je regrette de ne pas avoir pu extraire quelques chapitres de plus. C'est vrai, c'est beau cette relation.