mardi 22 avril 2008

gourmandise

Aujourd'hui dans le métro j'ai vu une jeune femme lire avec gourmandise un livre. Elle venait visiblement tout juste de l'acheter (La Fêlure, de Francis Scott Fitzgerald), et on sentait dans sa manière de tenir le livre, de le toucher, d'en lire avidement les premières pages - qu'elle n'en pouvait plus de désir, que ce livre était l'objet le plus cher à ses yeux en cet instant, et qu'elle se réjouissait d'avance du plaisir qu'elle pensait y trouver.
(Il faut dire au passage que c'est purement génial, Fitzgerald : j'avais pris il y a quelques années un plaisir fou à lire un recueil de nouvelles, Un Diamant gros comme le Ritz, très bien constitué et annoté, dans une édition truffée de fautes de frappe...)

Ca me rappelle un jour où, dans un café du Marais, j'avais vu un jeune mec commencer à lire La Chartreuse de Parme de Stendhal - là aussi un de mes grands grands bonheurs littéraires. J'enviais ce garçon qui ne savait pas quel plaisir fantastique qu'il allait avoir (enfin j'espère - ça a peut-être été un pensum pour lui...), et j'avais envie d'aller lui dire "mon garçon, tu vas t'en mettre jusque-là de bonheur avec ce livre".

J'aime tellement les livres que j'aimerais pouvoir convaincre ceux qui ne lisent pas de le faire. J'avais entendu un jour Hubert Nyssen, le fondateur des Editions Actes Sud, dire qu'il avait choisi le velin de ses éditions d'une douce couleur crême pour le confort des yeux et "doux comme une peau de fesses" - eh bien pour moi c'est ça le livre : d'abord et avant tout la jouissance physique et intellectuelle de le désirer, de tenir l'objet, d'en caresser les pages, de l'aimer d'abord avec l'oeil, avant même de commencer à le lire. Et puis de me faire embarquer par ce qu'il y a dedans...


Francis Scott Fitzgerald, Un Diamant gros comme le Ritz, Robert Laffont "Bibliothèque Pavillons" ; 826 pages, 11,90€
Stendhal, La Chartreuse de Parme

3 commentaires:

Anonyme a dit…

en janvier dernier, j'ai terminé la Chaussure sur le toit (Vincent Delecroix) dans le train. J'avais envie que les gens voient sur mon visage le plaisir que j'avais. J'avais presque envie de dire à mes co-voyageurs le bonheur que c'était. Et puis je me suis tu. Ou, du moins, je n'ai parlé qu'avec mes yeux.

en tout cas je comprends bien cette note. :)

Anonyme a dit…

Je dis souvent "on n'est jamais seul avec un livre". J'avais entendu l'expression je ne sais où et je l'avais retenue. Car le livre, c'est un objet de valeur pour celui qui aime lire, c'est un lien insaisissable entre le bonheur du lecteur et les mots qui défilent sous ses yeux. Sentir dans sa main l'objet, et dans son esprit le plaisir du voyage, des émotions... Si je ne devais conserver qu'une chose, ce seraient mes livres... Comme je comprends ta note, et l'approuve...

Anonyme a dit…

Quand j'étais gamin, et que je lisais la bibliothèque rose, verte, j'avais des "rituels" un peu fétichistes avant de démarrer un bouquin que je venais d'acheter : lire la liste des titres des chapitres avant de commencer la lecture proprement dire... Regarder les planches de dessins en essayant de deviner ce qui allait se passer... Coller le nez dedans et respirer la bonne odeur d'imprimerie... Le virus était déjà pris !
Je n'ai plus les mêmes rituels, mais je continue à vénérer mes livres, et, comme Andesmas, on me ferait tout brûler plutôt que ma bibliothèque...
Certains sont même devenus des amis que je revisite régulièrement... au point que j'en connais certains passages par coeur ! ça m'inquiète même un peu, à force ! C'est grave, docteur ...?