mercredi 17 septembre 2008

classe de maître

Olivier m'a fait la surprise de m'emmener hier soir au Théâtre de Paris voir Master Class, la pièce de Terence McNally interprétée par Marie Laforêt dont on avait déjà tellement parlé en 2000, et pour lequel elle avait gagné un Molière de la meilleure actrice.
Le texte est très largement inspiré des dernières master classes que donna Maria Callas, à la Juilliard School à New York en 1972, alors qu'elle était de longtemps privée de sa voix...
C'est une nouvelle adaptation, une nouvelle distribution et une nouvelle mise en scène. Je n'avais pas vu la première donc je ne peux pas comparer - mais j'ai été, comme toute la salle, particulièrement fasciné par la prestation de la comédienne qui, pendant près de deux heures, est quasi seule à parler, à habiter un si extraordinaire personnage.
Car c'est bien Maria Callas qui est le personnage central de ces leçons : en tant qu'enseignante bien entendu, même si elle dit à plusieurs reprises qu'elle n'est pas là, qu'il ne faut pas la regarder et que ce n'est pas elle la vedette de la soirée - même si elle est omniprésente... (ça, c'est du Callas dans le texte, je suis sûr) - mais surtout, par ses longs soliloques quasi fantômatiques, en tant que Maria Sofia Kalogéropoulos, cette femme grecque si terriblement seule et blessée qui se cachait derrière la si célèbre artiste.
La première partie est magnifique, qui nous montre la vieille diva exécrable avec tout le monde, totalement centrée sur elle-même et ses anciens succès, qui va petit à petit s'humaniser, jusqu'à la fin de la première partie (par un artifice totalement extraordinaire que je ne révélerai pas !), véritable apogée de la pièce. Après la pause, la seconde partie ne tient malheureusement pas les promesses de la première : elle est plus banale, plus convenue (on y croise deux types de chanteurs particulièrement marqués : la soprano imbue d'elle-même et le ténor con comme ses pieds mais qui chante divinement) - et un peu décevante lorsqu'on nous ressert, un peu froid désormais, le même génial artifice qui concluait la première partie (celui dont je ne dirai toujours rien).
Pour la performance de Marie Laforêt, magnifique, et pour apprendre un tout petit peu de la femme qui se cachait derrière la chanteuse (et entendre quelques phrases particulièrement cinglantes sur les réalités de notre métier d'artiste...), il faut aller voir Master Class. Puis-je me permettre de conseiller à ceux qui, comme moi, était scotchés à leur siège à la fin de la première partie - de rester sur cette émotion forte et de partir à l'entracte ?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

J'avais vu ce spectacle en 97 mais avec Fanny Ardant dans une Mes de Polanski, c'était formidable mais j'avais trouvé grâce à l'actrice plus qu'au texte.

Quand tu parles de quitter le spectacle, je t'avoue que je ne sais pas faire; au cinéma oui sans problème, mais au théâtre ou à l'opéra, je ne peux pas; sans doute par respect pour les artistes qui, je l'espère, croient en ce qu'ils nous donnent même si le résultat n'est pas celui attendu. Simplement je n'applaudis pas et c'est peut-être pire. Début juillet j'ai vu Don Carlos à Bastille et la prestation de la mezzo Yvonne Naëf en Eboli a été calamiteuse; à la fin du "O don fatale",quelques maigres applaudissements puis un silence glacial...

Rappelons que dans ses dernières années et selon le témoignage de ses proches, Callas passait toutes ses soirées à écouter les enregistrements pirates de ses spectacles, à la recherche de sa voix perdue.

Mambrino

Anonyme a dit…

Il est difficile de quitter une représentation. Comme le dit Mambrino, c'est plus facile au cinéma, car on sait que l'on a aucune influence sur le spectacle proposé.

Sarah Kane expliquait qu'elle avait choisi d'écrire pour le théâtre justement pour ce côté performance en direct qui faisait que lorsqu'un spectateur quittait la salle, ou tout simplement éternuait, il y avait une influence sur le spectacle. Elle disait aussi qu'il est beaucoup plus difficile de quitter une salle de spectacle que d'éteindre sa télévision. Nous avons un contrôle sur l'écran que nous n'avons pas sur la représentation, et c'est en cela que la scène est un lieu encore plus magique qu'il ne l'est déjà!

C'est marrant que tu parles de Marie Laforet ces jours, car j'écoute en ce moment un de ses best of. J'aime beaucoup cette chanteuse et comédienne. Tellement diva, tellement femme, en décalage complet avec les chanteuses de sa génération. Elle avait et a toujours un talent naturel.

Ta critique me donne envie de vite monter à Paris voir la pièce... Mais pourquoi est-ce que je me sens biaisé par le fait d'être en province?!!